Il est une loi fatale, mystérieuse, universelle, inexplicable à la science. C'est la loi de la souffrance. Cette loi promulguée le jour où le péché entra dans le monde, est conçue en trois termes, qui, dans leur triste généralité, embrassent les maux et toutes les infortunes qui affligent le genre humain.
– Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front, fut‑il dit à l'homme.
– Tu enfanteras dans la douleur, fut‑il dit à la femme.
- Tu sentiras dans la poussière la maladie et les germes de cette décomposition qui se consommera dans la tombe.
A partir du jour où fut fulminée cette triple sentence, la douleur est devenue une grande loi de l'humanité. Semblable à un vaste fleuve, elle a promené depuis six mille ans ses eaux amères à travers les générations. Tous les mortels, plus ou moins, mais tous sans exception s'y sont abreuvés.
La race déshéritée d'Adam, pareille à un grand malade, se tourne et se retourne sur son lit de déchirement et d'angoisse.
En dépit de ses efforts désespérés, malgré les merveilles de son industrie et l'étendue de ses conquêtes, elle n'a pas cessé un instant de souffrir ; jusqu'ici elle n'a pu parvenir à vaincre la pauvreté, les maladies et la mort.
Avant Jésus‑Christ, l'humanité offrait l'image d'un grand supplicié, atteint, dit Isaïe, des pieds à la tête, et n'ayant pas en son corps une seule partie restée saine : pour la soustraire à l'inexorable loi qui pesait sur elle depuis sa déchéance, il ne fallait rien moins qu'un médecin descendu du Ciel...
L'homme malade ne pouvait guérir que par l'application d'un remède supérieur et divin.
L'homme malade ne pouvait guérir que par l'application d'un remède supérieur et divin.
Jésus‑Christ aurait pu, sans doute, abolir d'un seul trait la douleur, et en vertu de la grâce infinie de la Rédemption, replacer l'homme dans l'état de félicité complète et sans mélange dont il jouissait dans le paradis d'innocence. Il ne l'a pas voulu.
Il a jugé que pour plusieurs la souffrance deviendrait un mérite, un gain, une source de gloire et un élément de renouvellement et de triomphe ; que pour le plus grand nombre elle serait une expiation nécessaire.
Il a donc maintenu la souffrance, mais il l'a purifiée, ennoblie, transfigurée en se l'appropriant. Il s'est fait l'homme de douleurs, virum dolorum, suivant le sens strict et absolu de ce mot.
Jésus‑Christ pouvait apparaître parmi nous, nageant dans les délices, environné d'une splendeur divine, dans l'éclat et la pompe de sa majesté souveraine ; il jugea plus digne de sa gloire et plus profitable au salut des hommes, de se montrer à eux ceint d'un diadème d'épines, vêtu de pourpre et souillé de sang, le visage meurtri, le rictus de la mort sur les lèvres, l'onction sanglante des clous, imprimée sur ses mains et sur ses pieds.

Pareil au serpent d'airain, dressé par Moïse dans le désert, il s'est planté lui‑même, au centre du monde, comme un instrument inépuisable de miséricorde. de vie et de santé. Par suite de cette transformation, ses divines plaies restent éternellement ouvertes à toutes les âmes égarées et déchues, avides de se soustraire à leurs aspirations sensuelles et grossières, désireuses de se retremper dans les joies du sacrifice et dans l'honneur de la pureté.
Qui n'admirerait ici les conseils profonds de la Sagesse infinie. L'homme s'était perdu dans le Paradis de délices, il se relèvera dans les brisements du Calvaire.
Il avait refusé d'aller à Dieu par le chemin de la félicité, Jésus‑Christ lui ouvrira une route meilleure et plus sûre, celle de la croix.
« Le Ciel et la terre étaient séparés ; la Croix les a réunis. »
Dans la croix est le salut ; dans la croix est la force et la joie de l'esprit ; en elle se trouve le complément de la vertu et la profusion de toute sainteté.
Extrait de "Fin du monde présent et mystères de la vie future" par l'abbé Arminjon. Un livre de chevet)
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