La journée a passé, le temps s’est écoulé. Heure après heure, le soir est arrivé. Il ne reste plus beaucoup de temps avant le couchant. C’est donc le moment ultime pour penser tout ce qui doit être pensé, pour dire tout ce qui doit être dit…. Il faut boucler sa journée comme on boucle sa valise, prêt à partir pour le grand voyage. Encore un peu de temps et le jour s'en ira .... C'est l'heure bleue. Le mouvement du monde se calme, le soleil se cache. Je partirai avec le couchant.

mardi 28 février 2012

Entre 400 et 800 agriculteurs se suicident chaque année

Entretien avec Edouard Bergeon, auteur du documentaire "Les Fils de la terre", diffusé mardi 28 février à 22h50 sur France 2. Edouard Bergeon revient sur les raisons qui l'ont amené à réaliser ce documentaire, en évoquant notamment le suicide de centaines d'agriculteurs, dont celui de son père, Jean-Jacques Cecconi. Il a suivit pendant plus d'un an le quotidien d'un producteur de lait du Lot acculé à la dépression par les dettes.
Pensez-vous que votre documentaire, qui a reçu une mention spéciale au Festival international des programmes audiovisuels, fin janvier, toucherait autant si vous n'y expliquiez pas que la situation de Sébastien rappelle exactement celle de votre père, lui aussi agriculteur, qui s'est suicidé il y a treize ans ?
Je me pose moi aussi la question, je ne sais pas. Je pense quand même qu'évoquer au fil du documentaire mon histoire et celle mon père - qui, lui aussi propriétaire d'une ferme de belle taille, s'est retrouvé face à un gouffre financier et au désespoir - donne le sentiment que je sais de quoi je parle.
Il existe un vrai parallèle entre hier et aujourd'hui, entre mon père et Sébastien : la solitude, l'abandon des banques, la sous-facturation du lait qui amène à travailler à perte chaque jour. En quinze ans, rien n'a vraiment changé, l'agriculture est en crise permanente. L'histoire de Sébastien est emblématique de centaines d'autres !
Selon les sources d'informations, ce sont entre 400 et 800 agriculteurs qui se suicident chaque année... Qui en parle ? Les Français aiment pourtant leurs paysans qui les font manger.

Votre film se clôt sur un formidable renversement de situation, une ouverture : ce regroupement d'agriculteurs pour créer leur propre marque et fixer eux-mêmes le prix de leur lait fonctionne-t-il toujours ?
Oui, en se rencontrant lors de la grève du lait, en échangeant sur leur situation, vingt-cinq producteurs (dont Sébastien) de trois départements ont décidé de ne plus dépendre des industriels ; ils ont parié sur la solidarité et une démarche de qualité, et c'est viable. Ils ont créé leur brique de lait "Vallée du Lot", ont passé un gros contrat avec Ferrero Rocher en Italie, fournissent les cuisines des ministères, et dialoguent aujourd'hui avec Franprix et Monoprix. C'est encore dur, mais au lieu des 200 euros la tonne qu'on leur accordait, ce qui ne leur permettait pas de survivre, ils la facturent 350 euros.
Envisagez-vous de faire vivre votre film au-delà de sa diffusion à la télévision, le 28 février ?
Dès le tournage, avec Luc Golfin mon coauteur et monteur, nous pensions que ce film pourrait tourner en France, dans des salles d'art et d'essai, des festivals, pour aller à la rencontre du public ; un distributeur est intéressé, reste à trouver le budget. France 2 nous a permis de réaliser ce film en toute liberté, mais pour l'adapter au grand écran, nous le "détéléiserons" un peu en ôtant des commentaires, en lui donnant un autre rythme, et en le raccourcissant de quelques minutes.
"Les Fils de la terre", diffusé mardi 28 février à 22h50 sur France 2 (Infrarouge).

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