" Je vous recommande vivement, comme très
significatif de la décadence des moeurs et de la société qu'elle nous prépare,
un livre de Catherine Ternaux publié chez Grasset et intitulé "La polygamie,
pourquoi pas ?".
Le point d'interrogation est purement formel. En réalité ce livre
est un hymne à la polygamie - polygynie ou polyandrie. La polygamie est
présentée le plus sérieusement du monde comme un remède au divorce.
Peut-être
d'ailleurs est-ce là l'expérience vécue par l'auteur qui ne s'étend pas sur sa
vie personnelle, mais dédicace son livre "à Jean-Paul, mon mari, dans l'amour
tout entier de mon coeur".
Aimer "entièrement" plusieurs êtres ! Quel idéal ! Il
faut en finir, dit Catherine Ternaux, "avec les paresseuses croyances sur nos
capacités d'aimer". "Ne sommes nous pas des handicapés de l'amour
dans la mesure où on nous "entraîne à n'aimer qu'une seule personne à la fois et
qu'ainsi notre force affective n'est pas exercée. Nous ne savons pas bien ouvrir
notre coeur quand bien même nous en avons envie.
Si dès notre enfance on nous
portait à cette habitude d'aimer pluriellement, cela serait différent. Parions
que plus on aime de personnes, plus on sait aimer..."
L'amour n'est plus un choix mais une expertise
!
En Afrique, au Gabon précisément, j'ai connu le tourisme sexuel totalement
décomplexé. Et j'ai pensé (c'était entre 1989 et 1991, mon premier poste comme
prêtre) que cette décontraction totale, où il n'y a ni possession ni jalousie,
pourrait bien être... l'avenir du monde occidental.
Au fond c'est ce qu'écrit
Catherine Ternaux en 2012, dix ans après. Qu'est-ce que cela signifie ?
Deux choses avant tout.
On tend à faire l'économie du choix amoureux,
parce que "choisir c'est renoncer" et qu'il ne faut renoncer à rien. On ne se
rend pas compte que, faisant l'économie du choix, on fait l'économie de l'amour,
de son entièreté non négociable, de l'aventure existentielle qu'il signifie, de
l'absolu qu'il représente et auquel il nous introduit, de l'ambition magnifique
de l'une seule chair (hébreu : basar : un seul être humain)...
Et on remplace
tout cela par une affectivité vague, qui se réduit finalement à un libre service
sexuel généralisé, où la déontologie du consommateur remplace la morale.
On oublie l'enfant, qui n'est pas le fils de
personne mais le rejeton d'un homme et d'une femme, auquel on va transmettre une
culture, des valeurs, une expérience et qui va lui-même se construire dans son
rapport à son père et à sa mère, en puisant non seulement dans l'amour qu'ils
lui portent mais dans l'exemple de leur amour mutuel la force d'affronter
l'existence.
Pourquoi le divorce constitue-t-il un traumatisme pour l'enfant
bien plus que pour les adultes ? Parce que le mariage est nécessaire à l'enfant
qui, pour être équilibré, doit être un enfant de l'amour (c'est-à-dire du
choix).
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